Science-de-la-liaison

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"Approche de Hölderlin" - Martin Heidegger -

L’humanité en appelle toujours à cette époque lointaine, où elle croit devoir entendre, à juste raison, l’unisson pleinement harmonieux de la nature et des hommes, l’épopée brillante de représentations et d’images que fut l’hellénisme.

Dans une marche constante, l’affirmation des consciences n’a eu de cesse de promouvoir écrivains et poètes en quête de volupté, de belles apparences mêlées à une connaissance profonde du mythe Antique ; le Sublime d’où se sont exprimés les thèmes fondamentaux de la pensée. A la mesure de Nietzsche « l’opposition entre le monde apollinien et le monde dionysiaque, entre la mesure, l’apparence, la forme d’un côté et l’ivresse, l’extase, l’oubli de soi de l’autre. Ou pour le dire autrement, entre le voile du rêve et la puissance destructrice de la vérité ».

Hölderlin est resté profondément attentif à conserver l'accomplissement de l’esprit olympien dans une œuvre prophétique au langage pure, une région de la conscience profondément enracinée dans la symbolique du rayonnement d’Apollon sauvant Dionysos de son déchirement oriental.

Notons ici que Hölderlin n'a été reconnu qu’à partir des travaux entrepris par Nietzsche.

C’est bien certains, qu’en premier lieu, la parole du poète, à peine dite, échappe à toute garde, car elle conserve le fond de l’essence même de l’être, ce qui ne peut être dit autrement que poétiquement, les poètes sont nos étrangers, chez qui le Sacré est dans la parole poétisée le médiateur du Céleste, car nul doute « C’est poétiquement parlant que l’homme habite sur cette terre ».

Hölderlin est nourri par le Divin, omniprésent, il est le tout, les origines est précisément la parole poétisée, c’est pas uniquement ce dernier  qui viendrait à s’exprimer par Hölderlin mais bien cette volonté, le libre arbitre, du poète d’essaimer à sa patrie, son peuple, les origines d’un commencement céleste par lequel s’exprime la nature même de l’être, de l’être poétique ; l’homme n’est plus artiste, il est l’œuvre d’Art, par quoi le divin apaise dans la joie et le retour à la terre.

Aussi bien le sens Sacré contient en substance l’essence de l’apaisement, l’omniprésence du Divin, phénomène «médiat » dans « l’immédiateté » , universel et partout à la fois à tout instant, admet que la question de l’être n’a pas à céder au désespoir du vide ; pour autant que l’existence de Hölderlin nous laisserait entendre le contraire.

Ce poète de l’entre-deux nous est proche, car il réunit et nous fait habiter le monde des hommes de la terre et des dieux, dans la joie la plus pondérée ; mais pour ce grand dispantiateur de lumière, attrapé par la noire mélancolie du destin, esseulé dans le vestibule de la folie, …………….ces mots « la conscience à ce fameux de détotaliser la totalité, et par elle s’exprime le Divin, selon quoi nos angoisses n’ont plus raison d’être… ».

Les grecs ont « imaginés » l’anthropomorphisme Divin pour rendre cette proximité désormais supportable, nul doute que l’idéal de Hölderlin est tourné vers ces premiers pas du regard de l’être pour l’être ; mais nos illustres ont fait converger la foi au chevet de l’esprit tragique, les dieux devaient à présent s’affronter sous le regard médusé des hommes, les Grecs qui connaissaient mieux que personne les frayeurs et les horreurs de l’existence ont transfiguré l’origine même du désespoir à travers cet Art bouillonnant de lucidité qu’est la Tragédie Attique.

Aussi bien, la catharsis opérant dans la tragédie, laquelle mît en évidence l’honnêteté profonde des Hellènes contre les éléments, à l’Un-primordial, montre que le poète semble animé des mêmes préoccupations, de rechercher cet embrasement originel en l’homme, concentré sur le fond de son Être-là, confondu à la quadripartie qui inonde de sa pureté éblouissante. La parole poétique éveille ainsi le réel ; pour autant que le poète en soit exclu :

« C’est seulement ainsi que la contrariété  peut se manifester dans l’extrême acuité de son altérité ».

Exclu car Hölderlin est ce navigateur qui entend et salue des plus hauts degrés de l’Art Grec, frappé qu’il fut par le rai d’Apollon. En un sens, cette parole est si proche et malgré tout si lointaine « le poète colonise » qu’on imagine difficilement un Platon, en son temps, condamnant cet hymne universel qu’est l’élégie « Retour » :

« Ainsi je suis seul. Mais toi, au-dessus des nuées,

Père de la patrie ! Puissant Éther ! et Toi,

Terre et lumière ! Trois en une alliance qui régnez et aimez

Dieux éternels ! Avec vous je suis allé dans mon voyage,

Vous, Ô joyeux, je vous ramène, moins novice ! »

 

Si le mythe Grec est si puissant, c’est qu’il donne du plaisir, celui de se projeter hors des contraintes de l’existence. La parole poétisée par Hölderlin réunit sous des sentiments analogues dans une réalité encore plus profonde et tend à apaiser nos angoisses. Le retour à la « terre », la « patrie » sous la lumière ardente du Divin apaisant, rendu à la sérénité par la parole poétique.

On peut dire que la tendresse constitue le trait fondamental de la popularité des Grecs, ce combat constant du cœur pour libérer les hommes de la servitude – « le belliqueux héroïque » au sens d’Héraclite – ressort dans cet union poétique de la réflexion de l’Être et du beau, la parole poétique de Hölderlin constitue un témoignage bouleversant en direction de la phènomènologisation  du concept Grec.

 

Hölderlin n’est pas juste ce grand poète, car ici la parole se double d’un idéal, celui devenu rare des grands philanthropes et protecteurs du destin. L’élégie exige la fidélité à la terre natale, mais aussi le retour à soi…., c’est le langage de la loi historial de l’Être :

 

« Car l’esprit n’est pas chez lui au commencement,

Il n’est pas à la source. Il est en proie à la patrie

L’esprit aime la colonie, et l’oublie vaillant.

Nos pleurs et l’ombre de nos forêts le réjouissent

Lui, l’accablé. Celui qui donne l’âme se serait presque consumé ».

 

Ce vers est l’essence même de l’idéalisme allemand, rappelons que Schelling est le plus proche ami de Hölderlin, au sens où l’Être en soi de l’esprit  exige le retour à soi-même, à la réalité qui surgit à partir de l’unité de son Être, si bien que cette pensée nous évoque le retour aux origines même de la volonté, elle constitue donc le principe inviolable de la subjectivité inconditionnelle contenu dans la métaphysique, de son étendue absolue et philosophique.

On pourra spéculer des heures durant sur une prétendue étiquette philosophique chez Hölderlin, alors que chacun doit seulement se demander si nous appartenons à ses poèmes, en quoi la parole poétisée abrite le secret de la proximité de la totalité de l’Être-Un sous le Signe unique de conserver l’univers.

 

Heidegger nous livre une analyse fine de trois poèmes que sont le « Retour », « Comme un jour de fête «  et « Terre et ciel » ; mais on comprend combien il est plus aisé d’exprimer un ressenti. Si bien que j’ai souhaité un avis tourné vers la partie insigne du mythe, les racines antiques où se sont exprimés les plus hauts degrés de l’Art, ce « Signe » qui caractérise toute la sureté et le sens le plus noble de la parole poétique de Hölderlin.

 

Heidegger nous livre de précieux éléments de compréhension :

« Si l’esprit veut jamais devenir l’esprit de l’histoire d’une humanité sur cette terre, il faut que les pensées poétiques de l’esprit s’assemblent et s’accomplissent dans l’Âme du poète, pour autant que celui-ci, sur cette terre et pourtant par-delà cette terre, montre le ciel et, montrant ainsi permet que la terre apparaisse dans son Éther poétique ».

 

« Et Haut de l’Éther jusqu’à l’abime en bas

Selon un ferme statut, comme jadis, tiré du chaos Sacré,

L’esprit se sent à nouveau créateur »….

 

L’esprit du poète ….

 

Conclusion :

On peut sans difficulté oublier une chose…. Par égard à l’inconfort qu’elle suscite ; mais on peut aussi « s’oublier » quelque part, parce qu’au contraire ce quelque part nous enveloppe de sérénité, de Volupté et d’Amour…. Il n’est pas rare de s’oublier chez Hölderlin, sa parole nous capte par l’innocente clarté du « Signe » et nous en pouvons que saluer le sens Sacré à l’épreuve, dans un dévoilement pénétrant de l’âme humaine.

Le signe poétique transmis par Hölderlin est rare, il est Sacré car il consacre l’Être de l’âme humaine.

Le signe, ce particulier, a en lui le pouvoir « rare » de provoquer l’unisson des consciences, de rassembler le propre d’une vision dans l’univocité d’un destin conjoint et heureux, c’est pourquoi il est si rare de capter ce cachet authentique dans le paysage désolé du monde accidenté par la confusion.

 

Cette lumière philosophique à ma fenêtre me remplit de satisfaction, de joie et d’espoir, elle inonde ce relief sidérant des bassesses de l’âme humaine, [[ où tous ces esprits malsains, calculateurs, montrent que le Mal est le trait caractéristique de leur existence ]] je leur assigne cette pensée de Nietzsche :

 

« Ce qui est fait par Amour et toujours fait par-delà le Bien et le Mal »…

 

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25/02/2014
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