Science-de-la-liaison

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Préface n°2 "Critique de la raison pure" -Emmanuel Kant- 1787.

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Pourquoi une réédition, après la parution quelques années auparavant de la fameuse « Critique de la raison pure », ce pivot essentiel du triptyque constituant l’œuvre de la philosophie kantienne : la raison pure, la raison pratique et enfin de la faculté de juger. La question du pourquoi  est cruciale  car Kant ne se contente pas d’une réédition stérile par appât du gain notamment, d’un texte qu’il méditât durant un long silence de dix ans, mais repense la totalité du premier jet, modifie son texte – dont on sait la complexité – pour mieux répondre à une interprétation caduque, des premières heures, une vigueur controverse qui trop souvent  occupe le temps et la pensée du philosophe par défection, seulement parce que celui-ci marque une progression plus opiniâtre sur ses pairs, qu’il anticipe avec lucidité et porte à la connaissance la portion d’un savoir qu’il est nécessaire de soumettre à la raison   – si seulement cela put le distraire, car chacun retranché derrière son mur d’airain idéologique, celui du rationalisme dogmatique pour les uns, ou bien la suspicion d’un idéalisme [dialectique] pour les autres démontrant sinon une période d’agitation critique, un agacement à devoir porter la lumière sur des travaux évidemment brillant par leur attrait subversif. Pour autant Kant fut très affecté par ce déchaînement tempétueux, car il vînt principalement de son propre camp, de ses anciens élèves notamment, Fichte, Reinhold ….dont les quelques travaux éparses parachèvent finalement l’œuvre du maître.

Ainsi, une nouvelle préface, qu’il semble utile de soumettre à la première, car dans sa préface d’origine Kant montre, en prime abord, le déclin, l’échec d’une pensée toujours circonscrite  à une métaphysique dont l’intérêt du questionnement est voilé par cette hostilité dogmatique à ne considérer la question [de la métaphysique] que de manière frontale ; or c’est justement par une préface d’inspiration négativiste que Kant perçût par la suite son erreur, vers laquelle le criticisme marchât avec fracas d'ailleurs. C’est aussi plus complexe, car toute l’histoire du questionnement philosophique converge à hauteur du rayonnement métaphysique –dont on peut aussi penser qu’il s’agit d’un principe isolé de philosophie, et parfois d’inertie subjectiviste, quand par surcroît la rhétorique langagière porte en elle l’instinct de la méthodologie scientifique –Kant a digéré la physique newtonienne et s’attache à souligner la prééminence des thèses cartésiennes tout en redéfinissant (indirectement à travers Leibniz..) la psychologie de l’ego-cogito. Kant a cherché toute sa vie à démontrer, à anéantir la scientificité rationnelle, il en est d’ailleurs convaincu lors de l’achèvement de sa première critique. Chacun sait qu’il reproche à Descartes la construction psychologique de son sujet pensant : « l’ego-cogito » et le « cogito ergo sum » : « Que le moi qui pense ait toujours dans la pensée la valeur d'un sujet, de quelque chose qui n'est pas seulement attaché à la pensée à titre de prédicat, c'est là une proposition apodictique et même identique ; mais elle ne signifie pas que je suis, comme objet, un être subsistant par moi-même ou une substance »; mais la réalité kantienne de la substance n’est pas plus avancée, elle revient seulement sur le paralogisme psychologique de Descartes, l’antagonisme entre la « vie de surface » et « la vie profonde » est toujours aussi vivace, Kant circonscrit la réalité nouménale, la chose en soi et donc la raison à l'expérience phénoménologique. Il aura cependant déterminé, en posant la « limite » de son système, le caractère insaisissable de la subjectivité opératoire, et ainsi suggéré les prémices de la nouvelle science phénoménologique.

Ainsi donc, la volonté de rééditer son œuvre tient pour Kant à recentrer les principes axiaux de son système critique en coupant court à la divagation fantaisiste, qui trop souvent animée par son dogmatisme inflexible est incapable, selon lui, d’investiguer le champ  suprasensible de manière prompte à reconsidérer l’autorité de la raison dans la sphère sensible, aux confins de l’expérience vécue, lorsque la raison éprouve sa « limite » nette –d’ailleurs le mot clé dans le système kantien est : « limite ». Kant a bien compris que l’aspect négatif de sa critique du scepticisme dogmatique  - les limites de la raison - doit se renouveler et prétendre à une forme d’optimisme philosophique :

« Je suis à présent occupé ……. A une deuxième édition de la Critique et je m’efforce d’élucider différentes sections de celle-ci, dont la mauvaise compréhension a produit toutes les objections faites jusqu’ici ». Lettre à Jakob 1786.

« Je tiendrai compte (pour la deuxième impression) de toutes les interprétations erronées ou bien aussi des passages incompréhensible…. ». Lettre à Bering 1786.

Nouvelle préface, nouvelle introduction, améliorations, remaniements dans le texte, sont-ce les renforcements que Kant apporte à sa deuxième édition de la « Critique de la raison pure » parue en 1787, l’édition originale datant, quant à elle, de 1781.

Lorsque Kant s’éteignît le 12 février 1804, après la reconnaissance unanime de son œuvre dès 1786, il eut seulement ces mots, remplis de satisfaction :

« C’est bien »…. ! 

 

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15/08/2013
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