Science-de-la-liaison

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"Sur les épaules de Darwin" - Jean-claude Ameisen -

Que nous levions les yeux au ciel par une belle nuit étoilée, ou bien que nous regardions notre voisin, tout ce que nous voyons est déjà antécédent, on peut ressentir cette sensation presque étrange de n’être jamais installé dans le présent si tant est qu’on daigne porter ce regard lointain, l’instantané serait donc une chimère si finalement la vitesse de la lumière n’affichait d’intensité constante ; fort heureusement l’architecte de l’univers a formidablement examiné toute proportion, de manière à ce que sa mesure ne vienne déparer la conscience des accords harmonieux du présent, pourtant déjà furtif après avoir écrit ces mots. Ce formidable agencement du cosmos aborde-t-il la question cruciale de l’intelligence du point de vue de sa capacité à connaître les secrets de la totalité, l’univers nous sera de toute évidence jamais révélé dans son intégralité, nous sommes seulement capable d’en percevoir « la mélodie secrète », nous remettons en question ce grain originellement semé pour en tirer toute sorte d’interrogations existentielles jusqu’à maugréer sa propre existence cf. Cioran. Si la question du temps doit déjà se dépareiller du temps psychique (projection – vécu), pour finalement lui accorder une dimension spatiale, chère à Einstein, et bien que ce dernier postulât un univers statique, on sait aujourd’hui que plus le temps passe plus l’espace s’agrandit, et si l’univers n’avait aucune limite, que deviendrait notre perception du temps dans un espace infini, l’expansion de l’univers a été déterminée par Hubble du haut de son observatoire du mont Wilson, récemment on a admis qu’une force (opposée à la gravité), l’énergie sombre, guidait cette expansion vers des territoires inconnus, un espace qui sans cesse se crée depuis l’explosion primordiale et où le temps physique de Newton, une rivière s’écoulant sans fin, un flux constant, a pu faire croire que les « diamants étaient éternels » ; mais notre souci immédiat survient du fait que l’espace qui nous entoure se mue en une forme de tragédie annoncée où toutes les galaxies et planètes  auront un jour achevées leur dance cosmique englouties dans un néant infini où la voute céleste ne gardera plus que la mémoire fugace d’une effervescence primordiale ayant permis ce miracle prodigieux, la vie, l’apparition de la conscience, l’humanité. La plupart des hypothèses sur l’anéantissement de l’univers, la mort thermique etc.. semblent modélisées par cette constante cosmique, et pourtant rien ne permet d’infirmer l’idée d’un renouvellement, quelque part ; si l’univers est déterminé, réglé avec cette extrême précision, postuler ensuite que la nécessité est seulement le fruit d’une conjecture énergétique hasardeuse me semble inachevé, cette immensité ne serait due qu’à un concours de circonstances accidentelles : considérons le principe anthropique comme un indice, non une preuve, que l’ascension vers la complexité montre qu’il ne faut pas seulement s’étonner de l’intelligence mais plutôt d’une nature étonnamment homogène, érigée autour  des quatre forces fondamentales (nucléaire forte, électromagnétique, gravitationnelle, nucléaire faible), et très probablement par une théorie unificatrice dont on peut penser qu’elle n’est pas seulement le propre des physiciens.

« Cartographier les étendues les plus lointaines de l’univers, c’est mesurer les étendues de temps que la lumière a mis à nous parvenir », nous dit Jean-Claude Ameisen, ainsi si l’espace s’agrandit, le temps également, il semblerait alors que la recherche sur nous-même,  nos origines, soit ailleurs que dans les imperfections du vide, mais plutôt à la rencontre des traces que laisse l’évolution, et dont le cerveau humain serait capable d’interpréter, de recomposer les fragments de mémoire oubliés, recomposant cette extraordinaire cartographie du réel à partir de la seule variation du passé, la persistance du passé dans nos mémoires ouvre le chemin de l’inconnu en traçant cette lumière que le temps semble nous ôter à petit feu. L’auteur va d’ailleurs plus loin lorsqu’il prétend, à partir d’expérimentation sur les souries, que le cerveau est capable d’activer des portes inexistantes, de faire varier la topographie d’une carte à partir de fragments endormis, et ainsi d’en déduire un parcours d’exploration mental, une exploration virtuelle des champs du possible, si la mémoire nous montre le passé, elle recèle également la clé du futur, c’est pourquoi des êtres nus, à qui la mémoire est asséchée des figures du passé n’effectueront qu’un voyage, celui de la rencontre avec un monde ankylosé, dépourvu de changement, une géographie à sens univoque ; l’auteur semble nous indiquer que le phénomène de métamorphose à l’œuvre dans le développement consiste en une topographie redécouverte de nos origines, d’ailleurs le mobile de l’intelligence se situe probablement non loin de cette frontière immatérielle tracée entre l’évolution et le retour à une forme d’énergie universelle, pour recommencer, à nouveau quelque part, rouvrir une porte par-delà un passé inscrit en nous. L’auteur cite d’ailleurs Spinoza : « Le corps et l’esprit sont une même chose, vu sous deux angles différents, et nul ne sait ce que peut le corps… ».

C’est autant judicieux d’affirmer ici que le périmètre d’étude de la philosophie, précisément le questionnement relatif à l’Etre, s’affranchit souvent de ce que nous avons été, à notre insu, et qu’à cet égard une conscience collective implique de la question une ouverture davantage dirigée vers le commencement, puis l’évolution, la procession des générations, des mémoires, des destins, seul Heidegger aura uni cette réflexion sur l’homme, à juste titre temporalisée, et étendue comme anthropologie (cf. « Etre et Temps »). 

 

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31/03/2014
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